L’histoire de l’Afrique que nous connaissons, a été écrite par les esclavagistes et les colons occidentaux. Elle est le récit de ce qu’ils ont vécu, et vu à travers leur prisme occidental,pour être plus précis, c’est leur version de l’histoire de leur rencontre avec les africains. Mais tout comme, on ne joue pas à pile ou face avec un seul côté de la pièce, il ne saurait y avoir une seule version d’une histoire. Il serait temps que nous africains, écrivions nous mêmes notre histoire, cette belle et grande histoire qui n’a commencé ni avec l’esclavage, ni avec le colonialisme.
Amilcar Cabral disait ”Les colonialistes ont l’habitude de dire que eux, ils nous ont fait rentrer dans l’histoire. Nous démontrerons aujourd’hui que non : ils nous ont fait sortir de l’histoire, de notre propre histoire, pour les suivre dans leur train, à la dernière place, dans le train de leur histoire.”, ce mini-essai s’inscrit dans cette démarche, sortir de ce train occidental où on est assis à la dernière place, pour reprendre possession du notre.
Nous nous intéresserons ici éminemment à l’indépendance du Cameroun. Les occidentaux nous ont toujours fait croire, qu’ils nous ont accordé l’indépendance, que celle ci fut le fruit de leur bonne foi, et de concertations avec le peuple camerounais. Nous vous démontrerons, que rien n’est plus fallacieux. La nation camerounaise est née dans le sang, le sang de centaines de milliers, voir de millions de camerounais, qui vont ainsi perdre la vie, consentant au sacrifice suprême pour bâtir une nation libre, où les humiliations, les atrocités, et la barbarie du colonialisme ne seraient plus qu’un mauvais souvenir. Un peuple en particulier au Cameroun, va payer le plus lourd tribut dans cette lutte pour l’indépendance. Il cristallise aujourd’hui encore toutes les tensions, surtout dans le contexte actuel marqué par l’ascension fulgurante sur la scène politique d’un descendant de ce peuple, le Pr. Maurice Kamto pour ne pas le citer. Ce peuple n’est autre que le peuple Bamiléké.
Nous allons nous intéresser particulièrement à leur origine, leur histoire, leur rencontre avec les autres peuples du Cameroun, et leurs particularités. Nous n’oublieront pas de parler, de ce problème d’ordre sociologique que certains appellent “le problème Bamiléké”, deson origine, de ses manifestations, voir de ses conséquences. N’étant pas Guy Parfait Songué, je vous préviens déjà que je ne mets pas ma crédibilité en jeu, quant à votre compréhension de ce mini-essai.
I- Origine du peuple Bamiléké
“Le nègre ignore que ses ancêtres, qui se sont adaptés aux conditions matérielles de la vallée du Nil, sont les plus anciens guides de l’humanité dans la voie de la civilisation ; que ce sont eux qui ont créé les Arts, la religion (en particulier le monothéisme), la littérature, les premiers systèmes philosophiques, l’écriture, les sciences exactes (physique, mathématiques, mécanique, astronomie, calendrier…), la médecine, l’architecture, l’agriculture, etc. à une époque où le reste de la Terre (Asie, Europe, Grèce, Rome…) était plongé dans la barbarie.”
Cheikh Anta Diop, Alerte sous les tropiques, Présence Africaine 2006, p.48
Le Peuple Bamiléké selon le chercheur Dieudonné Toukam, auteur du livre Histoire anthropologie du peuple Bamiléké publié en 2010, serait originaire des Baladis de l’Égypte antique. Tous les peuples africains ou
non viennent du Nil le berceau de l’humanité, mais les Bamiléké ont cependant ceci de particulier qu’ils seraient le dernier peuple à partir de cette région du continent, vers le IXe
siècle seulement de notre ère.
Ils arrivèrent en région Tikar, à Bankim/Rifum (Banyo, actuel Centre- Ouest Cameroun) au XIIe siècle. Ils furent voisins des Tikar, mais n’ont jamais été descendants des Tikar, contrairement à une idée reçue. Le peuple des Grassfields, unique avec une seule langue et un seul chef, se disloqua vers 1357 à la mort de leur dernier souverain unique, le Roi Ndéh. Yendé premier Prince, refusa le trône et traversa le Noun pour fonder Bafoussam. Sa sœur la Princesse Ngouonso (ou Kako), se tourna vers la région de Banso (il existe 123 groupements bamiléké dans le Nord-Ouest anglophone et 5 au Sud-Ouest – Lebialem). Deux décennies plus tard, Ncharé le cadet, descendit dans la plaine du Noun pour fonder le pays Bamoun. De Bafoussam naquit le gros des groupements bamiléké majeurs actuels (Baleng, Bandjoun…) et le processus a duré du XVe siècle au XXe siècle. Le Medumba est la langue mère de toutes les langues Bamiléké (Ghomala, fè-fèè, yembaa, ngomba). Plusieurs études dont celle de Jean -Claude Crhi, ont démontré que le Medumba était dérivé du Medu Neter (voulant dire langue des Dieux ou parole sacrée) langue originelle des égyptiens anciens.
Bamiléké ? Mais que veut dire Bamiléké ?
Plusieurs versions s’affrontent, mais les plus plausibles sont les suivantes:
-Cette version est inspirée des travaux de Jean Claude Chri le mot « Bamiléké » serait en fait une déformation de “BA’ Mieh Lah Ke’” , qui signifie “les frères venus du haut pays”. Rappelons que les égyptiens anciens, n’appelaient pas leur pays “Égypte”, mais “Haut pays » et “Bas pays » ou “Kemet » selon les egyptologues modernes.
-Selon les travaux de Justin Mouafa, le mot Bamiléké est une déformation par le colon de « pe me lekeu » qui signifie « les habitants des montagnes et des ravins » en langue Foto (langue parlée, dans des villages du département de la Menoua dans l’Ouest Cameroun).
II- La guerre du Cameroun (1955-1962)
« Un jour, l’histoire aura son mot à dire, mais ce ne sera pas l’histoire qu’on enseigne à l’ONU, à Washington, Paris ou Bruxelles, mais l’histoire qu’on enseignera dans les pays libérés du colonialisme et de ses marionnettes. L’Afrique écrira sa propre histoire, une histoire faite de gloire et de dignité. »
Patrice Lumumba,
Dans sa dernière lettre à sa femme Pauline,
Décembre 1960.
Cette guerre est inconnue du grand public camerounais, car elle n’est pas enseignée dans Le système éducatif camerounais, tout comme le Putsch manqué du 6 Avril 1984. Elle fut complètement occultée par la France, pour des raisons qui vous seront évidentes à la lecture des lignes qui suivent.
Pour résumer cette période, Jacques Ngom, Charles Assalé, Guillaume Hondt, Joseph Raymond Etoundi, Léopold Moumé Etia, Georges Yémi, Théodore Ngosso, Guillaume Bagal, Léonard Bouli, Emmanuel Yap, Jacques-Réné Bidoum, H-R Manga Mado créent L’UPC (Union des populations du Cameroun) le 10 Avril 1948 au bar café “chez Sierra” à Douala.
Bien qu’absent lors de la réunion fondatrice chez Sierra, Um Nyobe qui sera surnommé plutard “Mpodol” (qui veut dire porte parole en langue Bassa), en prend la direction en devenant son Secrétaire général de l’UPC en novembre 1948. Le tout premier président de L’UPC sera alors Mathias Djoumessi.
Um Nyobe grace à son intelligence exceptionnelle et sa lucidité politique hors norme, avait compris très tôt les dangers du tribalisme. Il a donc fait de l’UPC, un parti d’evengure nationale, qui transcende les ethnies et les tribus. Mais dans un pays multi-ethnique et grand comme le Cameroun, l’implantation d’un parti ne peut suivre un développement uniforme. Il se trouvera toujours à tel ou tel moment, une ou deux régions plus rapidement conquises que d’autres. Raison pour laquelle, la majorité des militants de l’UPC étaient les Bassa (Sanaga maritime) et les Bamiléké (Ouest Cameroun). L’UPC est parfaitement structurée, elle implante des centaines de “comités de base” à travers le Cameroun. Elle commence par les villes les plus importantes: Douala et Yaoundé, et continue dans les villages en Sanaga maritime, en région Bamiléké, dans le Moungo… même dans le Nord du pays.
L’UPC ne comptait qu’une centaine de militants à sa création en 1948, le mouvement compte près 14.000 adhérents en 1950.
“Nous avons connu les ironies, les insultes, les coups que nous devions subir matin, midi et soir, parce que nous étions des nègres. »
Patrice Lumumba,
discours du 30 juin 1960.
Les militants de L’UPC avec à leur tête Um Nyobe, protestent dans une démarche pacifique contre l’exploitation, les injustices et les humiliations du colonialisme français. Le Cameroun étant théoriquement « mis sous tutelle » et non exactement une colonie française, ce statut lui offre des opportunités juridiques devant le droit international dont ne bénéficiaient pas d’autres colonies. Um Nyobe père du nationalisme camerounais, interviendra à trois reprises entre 1952 et 1954 devant la commission de tutelle de l’ONU à New York.
Mpodol demande la réunification immédiate du Cameroun (Cameroun oriental, Northern et southern Cameroons), la constitution d’un conseil de gouvernement et d’une assemblée avec des pouvoirs législatifs, enfin la fixation d’un délai pour l’octroi de l’indépendance au Cameroun. Malheureusement il se heurte à un non catégorique de Paris, qui utilise tous les canaux diplomatiques à sa disposition, pour empêcher tout arbitrage favorable de l’Onu.
Dès 1949, la France avait déjà opté pour la politique du simulacre, en faisant émerger une opposition camerounaise, qui avait pour seul but de contrer l’UPC et de servir les intérêts de la France. Plusieurs chimères politiques vont alors naître: ESOCAM, LE RPC INDECAM…etc qui se présentent devant les camerounais comme des partis politiques, alors qu’ils sont des cache-sexes pour l’impérialisme français. Cette imposture est digne de Donatien Koagne ou de Frank Abagnale Jr.
Mais malgré la présence de ces escroqueries politiques, la popularité de l’UPC va toujours croissante. En 1954, selon Pierre Divol chef de la police française au Cameroun, l’UPC serait capable d’influencer 80.000 personnes environ. Cette montée irrésistible de l’UPC sur cette scène politique camerounaise balbutiante, mécontente la France. Elle voit en ce parti, un risque de perdre sa main mise sur le Cameroun. Face à ce danger, pour la France le constat est claire, il faut en finir avec ces bien gênants upécistes. C’est pour accomplir cette mission, qu’est nommé Roland Pré Haut-Commissaire au Cameroun en décembre 1954. Pré expose son programme au moment même, où il pose le pied sur le sol camerounais: Écraser les activités communistes pour défendre la civilisation.
Ah ce fameux mythe de l’Afrique menacée par la subversion communiste, avec Roland Pré en superman pour sauver ces pauvres africains, mais de qui se moque-t- on?
“l’échec est le meilleur des maîtres.”
Maître Yoda
Grâce aux leçons retenues de l’humiliante défaite française lors de la guerre d’Indochine, le Colonel Charles Lacheroy, le Colonel Jean Lamberton et d’autres officiers de l’armée française ont développé la D.G.R: Doctrine de Guerre Révolutionnaire. La D.G.R est en fait contre révolutionnaire. Selon cette doctrine, la guerre n’est pas qu’un conflit militaire, c’est une affaire politique, idéologique et même psychologique qui engage la population toute entière. Face une armée de partisans, qui mène une guerre révolutionnaire conformément aux enseignants de Mao Zedong, et qui se fond dans la population civile “comme un poisson dans l’eau”, elle propose de subvertir l’adversaire en imitant ses méthodes.
La guerre des 3P:
– Il s’agit d’abord d’une guerre Préventive, qui doit permettre d’agir avant que l’ennemi (le poisson) ne contamine la population (l’eau ).
-Cette guerre est ensuite conçue comme Populaire , puisqu’il s’agit d’obliger la population à se défendre elle-même contre l’ennemi.
-Cette guerre est enfin Psychologique, car l’enjeu n’est pas seulement de mobiliser les hommes physiquement, mais de les faire adhérer au projet politique et idéologique des autorités politico-militaires.
Roland Pré l’appliquera à la lettre. Début 1955, il va mener une campagne de diabolisation de l’UPC auprès des populations. Le but étant de retourner les populations contre l’UPC, de telle sorte qu’elles combattrons elles mêmes, ceux qui se battent pour obtenir sa libération du joug français. Ils sont traités de communistes pourtant, l’UPC ne prône pas la doctrine marxiste. Mais aussi, le leader du parti étant Bassa, ils vont stigmatiser cette communauté dans l’opinion publique, en parlant des revendications de l’UPC comme des revendications à caractère tribal. Il n’en est pourtant rien, le Mpodol étant le plus virulent combattant du tribalisme.
“La guerre psychologique « ne se déclare pas », elle “n’éclate pas » en s’accompagnant d’un ensemble de mesures spectaculaires telles que la mobilisation ou la concentration des armées. Elle s’établit, elle « est »; on constate un beau jour qu’elle sévit avec plus ou moins d’intensité et ce qui est grave ses victimes sont généralement conduites à cette constatation alors qu’il est déjà trop tard. La guerre psychologique est secrète et elle est d’abord clandestine.”
Le Colonel Lamberton
Ensuite ce cher Haut commissaire va démarrer ce rouleau compresseur, qu’est l’administration coloniale contre les militants de l’UPC. Il va mener une véritable guerre psychologique contre les militants du parti, en coordonnant des opérations judiciaires, administratives et policières, contre eux. Le but est ostensiblement, de les empêcher de se réunir, de se mouvoir, d’organiser des meetings ou de diffuser leurs idées bref de respirer. Conscients que Roland Pré leur tend un piège, les leaders de l’UPC demandent à leurs militants, de ne pas céder aux provocations. Ils ne comptent pas se laisser impressionner. C’est dans cette ambiance survoltée que le 22 Avril 1955, l’UPC demande l’indépendance immédiate et sans condition du Cameroun.
Roland Pré interprète cette nouvelle exigence, comme une preuve supplémentaire du caractère subversif de l’UPC. Dans les jours qui suivent cette déclaration, il déploie un lourd dispositif militaire dans les quartiers populaires de Douala, et dans le Moungo. Ce qui devait arriver, arriva. À la mi-Mai 1955, éclate une série d’émeutes violentes, conséquence de l’insatisfaction sociale des populations indigènes, des provocations continuelles de l’administration et du harcèlement dont sont la cible les militants et sympathisants de l’UPC. Les affrontements débutent le 15 Mai dans le Moungo, avant de s’étendre dans tout le sud du territoire Douala, Yaoundé, la Sanaga maritime, région Bamiléké. Ellessont immédiatement réprimés avec une violence inouïe, par les forces françaises.
Les leaders de l’UPC, sont accusés d’être les auteurs de ces troubles. Ils sont traqués et beaucoup se retrouvent emprisonnés. L’UPC entre donc dans la clandestinité “ le maquis”. Les Vice-Présidents du parti Ernest Ouandié et Abel Kingué, s’enfuient alors au Cameroun britannique. Ils sont bientôt rejoints par Félix Moumié, président du parti depuis le 2e congrès national, organisé à Eseka en 1952. Um Nyobe lui se réfugie, dans sa région natale la Sanaga maritime.
À partir de là vont coexister deux mondes parallèles, le Cameroun sous joug français et le Cameroun sous maquis dirigé par Um Nyobe, avec pour épicentre Eseka. Le décret d’interdiction de L’UPC est signé par le président du conseil Edgar Faure le 13 Juillet 1955.
Roland Pré est remplacé par Pierre Messmer en avril 1956. Ce dernier, même s’il emploie des méthodes moins brutales que son prédécesseur au début, poursuivra l’usage de la Doctrine de guerre révolutionnaire (DGR) contre l’UPC. Face la répression barbare française, lors d’une réunion les 2 et 3 décembre 1956 à Makaï en Sanaga-maritime, l’UPC décide d’enterrer le pacifisme qui leur était si cher, pour adopter la lutte armée. Une organisation paramilitaire est créée le CNO: comité national d’organisation. Sa première mission sera d’empêcher la tenue des élections des membres de l’assemblée locale, sur le territoire national. L’élection doit avoir lieu le 23 décembre 1956.
“Un peuple décidé à lutter pour sa liberté et son indépendance, est invincible.”
Ruben Um Nyobe
Le CNO passe à l’action le 18 décembre 1956. À 18 heures, les premières actions sont lancées: des candidats sont physiquement agressés, les bureaux de vote sont attaqués, des ponts sont sabotés et des centaines d’arbres sont coupés pour bloquer les routes. Le bilan de ces actions est mitigé dans la plupart des régions, mais dans la Sanaga Maritime l’objectif est atteint. Les élections n’ont pas lieu dans les deux circonscriptions de Sanaga de Maritime, fief d’Um Nyobe et foyer de l’insurrection. Pierre messmer réagit sur-le-champ. Fin décembre, les parachutistes de l’armée française sautent sur Eseka, et une zone de maintien de l’ordre y est installée. Les Upécistes sont traqués et abattus. Le CNO disposant de très peu d’armes, mais connaissant parfaitement les forêts de la Sanaga maritime, parvient à résister.
Parallèlement en région Bamiléké, la contestation reposant sur un puissant réseau de royaumes, s’organise autour de jeunes rois. Sa Majesté Kamdem Ninyim Roi de Baham, Sa Majesté Jean Rameau Sokoudjou Roi de Bamendjoun, Sa Majesté Marcel Feze Roi de Badenkop, sans oublier S.M Paul Bernard Kemajou roi de Bangou, se rapprochent du parti nationaliste. Le royaume Baham est le foyer de la contestation à L’Ouest. Le roi Kamdem Ninyim, ayant été rappelé de ses études parisiennes en 1954 pour succéder à son père, à la lumière du jour travaille avec l’administration coloniale, et la nuit tombée il soutient secrètement l’UPC. Un véritable agent double, qui met sa couronne au service de la cause nationaliste.
Le jeune homme est devenu profondément anticolonialiste, au contact des étudiants engagés contre l’impérialisme, de la fédération des étudiants de l’Afrique noire en France (FEANF) et de l’association des étudiants camerounais (AEC). Sous son règne, Baham devient un indubitablement un sanctuaire pour les résistants. Pierre Messmer nomme un homme de confiance Maurice Delaunay, chef administratif de la région Bamiléké (Juin 1956- décembre 1958). Il souhaite stopper la progression fulgurante de l’UPC en pays Bamiléké, mais a du mal à comprendre l’organisation social chez les Bamiléké et le système politique local.
« Si il n’y a pas un traître dans la maison, le sorcier de dehors ne peut vous atteindre. »
Proverbe Kabiyé (ethnie vivant au Nord du Togo)
Samuel Kamé, camerounais ayant fait ses études à sciences po Paris, et à l’école nationale d’outre mer, épaule activement l’administration française. Étant originaire de Baham, il donne les secrets des royaumes Bamilékés aux français, les aidant ainsi à comprendre le système politique local et les leviers pour les déstabiliser. Grâce à l’aide précieuse du répugnant Samuel Kame, ce grand maître de la traîtrise qui aurait même pu donner des cours à Judas Iscariote, l’administration coloniale réussit à infiltrer les milieux contestataires. Grâce à ses informateurs elle découvre le pot aux roses, et destitue S.M Kamdem Ninyim Pierre le 23 février 1957. Le souverain est condamné à deux ans de prison le 12 mars 1957. Il est suppléé à la tête du royaume par un homme favorable à l’administration coloniale.
“J’ajouterai simplement qu’il ne servirait à rien de constater et dénoncer les injustices arbitraires du système colonial, si l’action n’est pas organisée pour y mettre un terme.”
Ruben Um Nyobe,
Extrait du rapport présenté au premier congrès de l’UPC
Dschang, 10 avril 1950.
Les populations de Baham et les rois Bamilékés sont outrés par cet affront infligé aux ancêtres. Les traditions ayant été foulées au pied par les colons, le sentiment anti-français explose en pays Bamiléké, ce geste étant perçu comme l’affront de trop. Le très jeune upcéiste Martin Singap originaire de Badenkop, est une des figures centrales de cette révolte qui se propage comme une traînée poudre dans la majorité du pays Bamiléké, et même jusqu’au Moungo.
S.M Jean Rameau Sokoudjou, lui voit son royaume Bamendjou occupé entre Novembre 1957 et juin 1958. Ses femmes seront violées sous ses yeux par l’armée française. Maurice Delauney est d’une cruauté sans limite. Prisonnier des allemands pendant la seconde guerre mondiale, il s’inspire des nazis, et crée un camp équipé de barbelés, de miradors. Il y interne tous ceux suspectés d’être complices des maquisards. Viols, pillages, incendies, meurtres, émasculations, exécutions publiques…au cours de cette guerre, la liste des exactions commises par cette France, qui se réclame être la patrie des droits de l’homme, est interminable.
Lors de cette année 1957, le Cameroun a plongé dans la violence. En décembre 1957, Pierre Messmer l’ayant compris va alors s’inspirer de la DGR, pour créer la ZOPAC (Zone de pacification de la Sanaga maritime) placée sous le commandement du lieutenant Colonel Lamberton. Cet officier a 1500 hommes au total sous son commandement. Toutes les leçons de la DGR, sont mises en application dans la bataille de la ZOPAC: quadrillage du territoire divisé en “quartiers” et “sous quartiers”, déportation des populations dans des camps de regroupement inspirés du nazisme, mobilisation de milices de combat, exécutions sommaires, action psychologique, disparitions forcées, torture systématique des gens suspectés d’aider les nationalistes… Les combattants du CNO vont mal. Isolés, affaiblis et surtout mal équipés, ils sont incapables de tenir tête à l’armée française.
Le Lieutenant-Colonel Lamberton en blanc sur la photo ci-dessours, le 27 Mai 1957 en Sanaga Maritime.
Dans chaque ami, réside un traître potentiel.
Um Nyobe “Mpodol”, vraisemblablement vendu par Mayi Matip un militant de l’UPC(futur ponte du régime Ahidjo), est assassiné par l’armée française le 13 septembre 1958. Le cadavre du géniteur du nationalisme camerounais, est instrumentalisé par Lieutenant-Colonel Lamberton pour martyriser les esprits des populations. Il le traîne au sol, l’exhibe en public, le photographie et l’enterre sous une chape de béton.
La profanation du corps de celui que les populations de la Sanaga maritime, mais aussi du Cameroun considéraient comme un héros, a des effets dévastateurs. Des milliers de maquisards atteints psychiquement, quittent à contre coeur “le maquis » et se rallient la mort dans l’âme à l’administration coloniale. La ZOPAC est officiellement dissoute à la fin de l’année 1958. La France croit alors avoir porté un coup fatal à L’UPC, en la decapitant de son leader. Certains chercheurs, parlent de plus de 20.000 morts en un an dans la Sanaga maritime, un véritable carnage.
Chers lecteurs, nous ne sommes qu’au debut de cette grande aventure, que ce sera ce mini-essai sur le peuple Bamiléké au Cameroun. Dans l’épisode 2 de cette aventure passionnante, nous verrons comment s’est déroulé la lutte pour l’indépendance sans ce baobab politique qu’était Um Nyobe. N’hesitez pas à commenter, et surtout partager massivement dans vos groupes facebook, whatsapp…bref partout. Ahhh comme vous êtes toujours têtu(e)s, si vous ne partagez pas cette première partie, moi je ne posterai pas la suite eihnnnn.
Plus sérieusement, merci déjà à vous tous d’avoir pris le temps de me lire. Suivez moi ici et sur Twitter (a_nkam), pour être informé en temps réel dès que je posterai la suite de cette aventure. Il est temps que nous africains, racontions notre histoire comme nous l’avons vécu, et que nous l’enseignions à nos descendants.